Le Modèle JBI des soins de santé fondés sur les résultats probants
Le Modèle JBI des soins de santé fondés sur des pratiques exemplaires de soins a conceptualisé la pratique basée sur les résultats probants comme « une prise de décision clinique qui considère les meilleures données disponibles ; le contexte dans lequel les soins sont donnés ; les préférences du client ; et le jugement professionnel du professionnel de la santé » (Pearson et al 2005, p. 209).
Culture – Ressources – Communication – Collaboration
Traduit par le BEST avec l’autorisation du JBI, 2017. Source : Jordan Z, Lockwood C, Aromataris E, Munn Z. The updated JBI model for evidence-based healthcare. JBI. 2016
Le composant central du Modèle JBI (le « galet » – aka le « galet du savoir » selon le logo JBI) est conçu pour focaliser la conceptualisation des soins de santé fondés sur les résultats probants de soins de l’Institut. Pearson et al. (2005) définissent les résultats probants comme « la base des croyances ; la justification ou confirmation nécessaire pour croire que quelque chose est vrai » (p. 210). Pour que les professionnels de la santé soient capables d’établir l’utilité d’une large gamme d’interventions et de procédures, une large conceptualisation des résultats probants est nécessaire. Bien que les résultats probants d’efficacité soient reconnues comme étant de valeur, d’autres types de résultats probants sont considérés comme également importants puisqu’ils sont conçues pour répondre à différentes questions cliniques.
L’acronyme FAME (Feasibility – Appropriateness – Meaningfulness – Effectiveness) et cette conceptualisation large des résultats probants sont fréquemment cités et font clairement écho chez ceux cherchant à conduire des recherches pertinentes pour la prise de décisions en soins.
Le centre du Modèle démontre ceci, en englobant le concept FAME (Feasibility – Appropriateness – Meaningfulness – Effectiveness) :
L’acronyme FAME n’est pas uniquement une réflexion sur les différents types de recherche entrepris par les chercheurs en santé, mais il guide également la conduite de différents types de revues, la réalisation de produits et ressources dérivés et leur implantation dans la pratique.
Lors de la prise de décisions cliniques, les professionnels de la santé sont concernés par si leur approche est Faisable, Pertinente, Crée du sens et est Efficace. Nous définissons de ce fait les soins de santé fondés sur les résultats probants comme une prise de décision clinique qui considère la faisabilité, la pertinence, la création de sens et l’efficacité des pratiques de soins de santé. La faisabilité, la pertinence, la création de sens et l’efficacité des pratiques de soins de santé peuvent être renseignées par les meilleurs résultats probants disponibles, le contexte au sein duquel les soins sont donnés, le patient individuel, et le jugement professionnel et l’expertise du professionnel de la santé.
Ainsi que l’article original du modèle l’affirme : « l’accomplissement d’une santé globale améliorée est conceptualisée comme à la fois le but et le point final de chacun des composants du Modèle et leur raison d’être, et guide les soins de santé fondés sur les résultats probants » (Pearson et al. 2005, p. 209). Cette affirmation est un élément important de notre conceptualisation de la pratique fondée sur les résultats probants. Ce bloc du Modèle est placé au centre du modèle.
Il est important de relever que la production de nouveaux résultats probants peut être réalisée à partir d’études primaires ou secondaires. Les revues systématiques sont aussi essentielles que la recherche primaire dans ce domaine et peuvent aussi identifier d’importantes lacunes dans ce qui est connu au sujet d’un domaine, d’une intervention ou d’une pratique en particulier (et en conséquence l’importance des flèches à deux sens). Avec ceci à l’esprit, il est essentiel de reconnaître que la connaissance ne porte pas seulement sur l’efficacité.
La production des résultats probants du Modèle identifie le discours (ou la narration), l’expertise et la recherche comme des moyens légitimes de production de résultats probants.
Les trois éléments principaux de ce bloc sont pour JBI, les revues systématiques, les résumés de résultats probants et les recommandations pour la pratique clinique.
Le cœur de la synthèse des résultats probants demeure la revue systématique, qui est une forme de recherche à part entière (étude secondaire). La méthodologie de la revue systématique évolue rapidement avec les types de revues qui sont conduites. Ceux-ci vont des revues traditionnelles d’efficacité aux revues de recherches qualitatives, économiques et de coût-efficacité, de pronostic, de diagnostic, parapluies ou exploratoires, pour en nommer quelques-unes. Le champ des revues est immense, améliorant encore leur applicabilité et leur pertinence pour la pratique.
Cependant, des résumés de résultats probants à plus petite échelle ou revues rapides ont aussi émergé en tant qu’approche structurée pour synthétiser des résultats probants dans un délai court. Bien que les revues systématiques restent la règle d’or en synthèse du savoir, elles ne sont pas sans limites. Ainsi que l’ont remarqué Khangura (2012) et ses collègues, les revues systématiques s’achèvent généralement entre six mois et deux ans et se concentrent sur une question clinique restreinte. Ces auteurs suggèrent que les résumés de résultats probants offrent quelque chose de nouveau et sont potentiellement précieux dans le répertoire des synthèses car ils ciblent mieux les besoins des législateurs, des décideurs et autres utilisateurs des savoirs.
Les recommandations pour la pratique clinique sont des sources d’information résumées sur des pratiques spécifiques de soins au patient qui guident les professionnels de la santé dans leurs prises de décision clinique. Elles peuvent, ou non, être basées sur les résultats d’une revue systématique incluant des résultats probants internationaux. Ces recommandations pour la pratique clinique sont dans le bloc synthèse, en raison de la nature passive de ces publications. Nous reconnaissons, cependant, qu’elles peuvent être considérées à la limite de la synthèse/transfert, c’est pourquoi nous avons veillé à les positionner directement à côté du bloc transfert.
Le transfert des résultats probants est défini comme « l’acte de transférer le savoir aux professionnels de la santé, aux institutions de soin et aux systèmes de santé, globalement, par l’intermédiaire de journaux scientifiques, d’autres publications, de médias électroniques, de systèmes de support éducatifs, formatifs et décisionnels » (Pearson & al., 2005, p. 2013). Cependant, nous estimons que la production de produits additionnels dérivés des revues systématiques demeure largement une activité passive et souhaitons redéfinir le terme transfert comme un processus participatif coactif qui facilite l’accès et l’utilisation des résultats probants dans les contextes locaux. En ajustant cette définition, nous voulons recadrer le transfert comme un possible phénomène causal (c.à.d. facteur qui habilite, facilite et soutient l’implantation des résultats probants). En regard de cette définition, le transfert évolue donc vers le dépassement de l’interaction unique pour s’étendre au-delà d’une « publication ».
Les éléments du bloc « transfert des résultats probants » comprend la diffusion active, la formation et l’intégration dans les systèmes de soin. Pearson, Weeks et Stern (2011) énoncent les éléments fondamentaux de ce processus comme étant:
Les termes implantation et utilisation sont tous deux utilisés dans la littérature existante, cependant implantation semble mieux refléter cette activité dans le contexte du Modèle JBI. L’implantation des résultats probants dans le Modèle JBI est définie comme un ensemble délibéré d’activités facilitantes conçu afin que les parties clé intéressées s’appuient sur les résultats probants scientifiques pour éclairer les prises de décision clinique et générer une amélioration durable de la qualité des prestations de soin.
L’implantation des résultats probants inclut une analyse de la situation, la facilitation du changement de pratique ainsi que l’évaluation des processus et résultat.
Le Centre for Reviews and Dissemination (CRD) postule que les résultats probants demandent de suivre les étapes suivantes dans les programmes conçus pour implanter celles-ci (NHS CRD, 1999):
Bien que nous acceptions la récapitulation ci-dessus, les résultats probants en ce qui concerne les interventions à composantes multiples ne sont pas concluantes. Nous estimons donc que les modèles locaux, les leaders d’opinion ou les cliniciens qui facilitent le changement de pratique (que ce soit à travers des audits, des rétro-évaluations ou d’autres programmes) sont essentiels à une implantation réussie des résultats probants.
Environ neuf modèles d’implantation des résultats probants dominent la littérature des soins de santé et le succès de ces modèles dépend de la manière dont ils prennent en compte la nature complexe et multidimensionnelle de l’environnement des soins de santé – la pensée des systèmes. Découvrir de meilleurs moyens pour s’assurer que les patients reçoivent les soins dont ils ont besoin n’est pas facile et pose de formidables défis méthodologiques. Le chevauchement avec le champ de l’amélioration de la qualité et son champ parent de la théorie de la complexité est considérable.
S’inspirant des modèles et théories existants sur la gestion du changement et la traduction du savoir, le bloc d’implantation des résultats probants du modèle JBI cherche à garantir que ce processus tient compte de la culture et du contexte local, construit les compétences, soutient et renforce les infrastructures existantes d’une manière durable.
L’environnement des soins de santé étant inimitable et complexe, cela signifie qu’il n’existe pas une approche unique, linéaire qui fonctionnera à chaque fois pour amener les résultats probants dans la réglementation et la pratique. En fait, les résultats probants ne seront pas toujours faisables, pertinentes, faisant sens et efficaces dans un contexte donné. Nous suggérons donc que les principes fondamentaux de ce processus sont la culture, les compétences, la collaboration et la communication. De cette manière, les problèmes en lien avec l’implication des parties clé intéressées, la localisation du savoir, la réponse aux besoins locaux de savoir et la durabilité sont reconnus.
Le discours et la communication sont invariablement des pièces maîtresses du programme translationel. Cependant, Manojlovich et collèges (2015) conçoivent la communication comme étant plutôt implicite qu’explicite dans le modèle JBI. Le transfert des résultats probants (globalement) étant largement reconnu comme étant une activité discursive qui prend place dans un contexte global, une approche transparente et flexible utilisant un large éventail d’activités de communications promouvant la compréhension, l’identité ainsi que des buts et objectifs mutuellement bénéfiques est recommandée.
Il est important de ne pas voir le Modèle comme réducteur et ignorant, de quelque manière que ce soit, de l’importance des influences sociales organisationnelles et individuelles, culturelles et historiques, sur les prises de décision clinique. Il faut comprendre la similitude et la singularité des acteurs participant dans le processus de transfert des résultats probants dans la règlementation et la pratique ainsi que le besoin, dans une certaine mesure, de reconnaître ouvertement que c’est un processus organique, continu et évolutif qui demande un partenariat constructif et coactif des secteurs, des groupes et des individus.
Le Modèle a constitué une partie importante du développement de l’Institut, à la fois d’un point de vue scientifique et organisationnel. Il a fourni un cadre aux efforts académiques de l’Institut ainsi qu’un construit organisationnel d’opérations aussi bien au niveau local qu’international. Vu l’évolution du discours international sur les résultats probants et sa traduction dans la réglementation et la pratique durant la dernière décennie, il était opportun de revisiter le Modèle et d’examiner son applicabilité continue dans sa forme actuelle. Quelques changements/modifications à évaluer ont été effectués dans l’espoir de repositionner l’Institut théoriquement et pragmatiquement.
Traduit par le BEST avec l’autorisation du JBI, 2017. Source : Jordan Z, Lockwood C, Aromataris E, Munn Z. The updated JBI model for evidence-based healthcare. JBI. 2016
Pearson, A., Wiechula, R., Court, A., & Lockwood, C. (2005). The JBI model of evidence‐based healthcare. International Journal of Evidence-Based Healthcare, 3(8), 207–215. https://doi.org/10.1111/j.1479-6988.2005.00026.x
Khangura, S., Konnyu, K., Cushman, R., Grimshaw, J., & Moher, D. (2012). Evidence summaries: the evolution of a rapid review approach. Systematic Reviews, 1(1), 10–10. https://doi.org/10.1186/2046-4053-1-10
Pearson, A., Weeks, S., & Stern, C. (2011). Translation science and the JBI model of evidence-based healthcare . Lippincott Williams & Wilkins.
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